En politique, comme en négociation syndicale, il est une méthode bien connue pour « faire passer la pilule » ; il suffit d’annoncer avec détermination le passage de trois pilules puis, après négociations tractations et rétractations, se limiter à une seule pilule.
C’est un peu la même chose avec l’augmentation de la mutuelle pour 2020. À l’heure où l’inflation comme les augmentations de salaires flirtent avec le 1% seulement, les partenaires sociaux sont amenés à considérer comme « raisonnable » une hausse de 7,2 % de la part salariale de la cotisation à la mutuelle en 2020. Raisonnable cette augmentation de 7,2 % car, comme nous vous l’annoncions dans notre précédent article, elle aurait pu être de 24 %.
En effet, nous expliquions pourquoi il fallait s’attendre à un pourcentage élevé d’augmentation de la part salariale de la cotisation à la mutuelle au 1er janvier de cette année : notre prestataire Harmonie proposait d’appliquer la clause de stabilité (1) prévue au contrat qui entrainerait une hausse de cotisation de 6,61 %. La Direction était également favorable à une hausse significative en 2020. En l’absence d’une participation supplémentaire de l’IRSN et en préservant la provision pour égalisation (2) qui n’a pas pour objet d’amortir les hausses structurelles, l’augmentation pour le salarié aurait dû être effectivement de 24 %.
Que s’est-il donc passé ?
Tout d’abord, comme le préconisait la CFE-CGC, les partenaires sociaux se sont finalement accordés (avenant n°4 joint à l’accord relatif au régime de prévoyance santé) sur une augmentation inférieure aux 6,61 % applicables. La CFE-CGC proposait une augmentation, suivant le taux directeur (3) de 3,1 % d’Harmonie. L’augmentation finalement retenue est de 4,6 % soit 4 € au total par salarié et par mois.
Ensuite, comme le préconisait la CFE-CGC pour contenir la hausse de la part salariale de la cotisation à la mutuelle et diminuer la provision pour égalisation dont le montant parait excessif et pourrait attiser des convoitises, les partenaires sociaux ont prévu un prélèvement estimé à 135 k€ sur cette provision pour égalisation.
Enfin, la bonne nouvelle est que la part IRSN de la cotisation mensuelle à la mutuelle a pu être augmentée ; elle passe de 64,59 € à 67,09 €, soit une augmentation de 2,5 € rapportée à chaque salarié et par mois. Cette augmentation peut paraitre miraculeuse étant donné que la contribution IRSN est fixée par ailleurs à 1,65 % de la masse salariale et que cette masse salariale évolue peu.
En réalité, cette augmentation a pu s’appliquer par la réduction d’un appel complémentaire, disposition « technique » que nous vous présenterons dans un prochain article.
Dans ces conditions, la part payée par le salarié passe de 20,83 € à 22,33 € (+1,5 €), soit 7,2 % d’augmentation « seulement ».
Notes :
(1) Clause de stabilité : clause du contrat entre l’IRSN et Harmonie qui fixe en principe le pourcentage d’augmentation de la cotisation lorsque l’application du taux directeur (3) ne permettrait plus de maintenir l’équilibre des comptes, c’est-à–dire de maintenir le rapport P/C entre Prestations versées et Cotisations nettes reçues proche de P/C = 1.
(2) Provision pour égalisation : fonds de réserve qui permet d’équilibrer d’une année sur l’autre les comptes annuels entre les cotisations reçues au cours de l’exercice, nettes de frais de gestion et les prestations effectivement versées. En principe, cette provision ne sert qu’à compenser les incertitudes sur l’estimation, réalisée l’année précédente, des cotisations, prestations et frais de gestion de l’exercice en cours et doit rester modeste au regard du montant annuel des cotisations.
(3) Taux directeur d’Harmonie pour l’année n : pourcentage d’augmentation moyenne entre l’année n-1 et l’année n des dépenses de santé, estimé par Harmonie et applicable à l’ensemble des bénéficiaires d’Harmonie. La Mutuelle intervient en complément de l’Assurance Maladie, Il s’agit donc de l’inflation estimée dans ce secteur complémentaire, prenant en compte également les éventuels nouveaux désengagements de la sécurité sociale, transferts de charge, autres taxes ou obligations légales de solidarité, ou tout autre évolution structurelle. En principe lorsque l’année écoulée n-1, P/C = 1, l’application du taux directeur doit permettre d’obtenir l’équilibre des compte, P/C = 1 l’année n en cours.